Une approche personnelle dans le respect de la matière
Comme s’il s’agissait d’un système de défense, la roche, assemblage de minéraux, se présente à nous revêtue de son manteau de poussière.
J’observe cette masse recouverte d’aspérités et d’arêtes saillantes.
Lorsque le travail de sculpture opère, je n’ai nullement l’intention de plier ce matériau à ma volonté ; ainsi, le résultat final est en partie le fruit de mes idées et respecte par ailleurs les caractéristiques de la roche.
Ma quête est de permettre à l’œil de voir ce qui est déjà beau.
”L’essence de l’art, c’est la vérité se mettant elle-même en œuvre” L’art selon Heidegger
Comme chaque pierre est unique, je laisse la rencontre opérer
En effet, c’est l’histoire d’une rencontre entre une matière géologique massive, immobile, lourde et froide et un être « animé » de par son essence mais également de par ses intentions.
Un bloc de pierre se présente à moi.
Au premier abord je l’inspecte avec suspicion… dure, froide, sombre : elle produit par sa rugosité une sensation désagréable au toucher, comme pour mieux me repousser. Je l’observe avec méfiance et nous entamons alors un long dialogue durant lequel je cherche à la connaître, à la comprendre, à l’apprivoiser. Mais elle est d’un naturel plutôt « brut », et fait preuve de beaucoup de résistance.
Il est probable que ce tempérament réfractaire soit dû à son vécu, presque une éternité devant laquelle je me sens impuissante, une éternité durant laquelle elle s’est forgé une solide carapace.
Passé ce temps d’observation réciproque, le rocher miniature finit par se dévoiler timidement. Je m’approche davantage de cette masse grise et finis par la toucher en espérant qu’elle devine mes intentions bienveillantes à son égard. Peut-être qu’avec du travail, du temps et de la patience, elle acceptera de se réchauffer et dévoilera ses fissures, ses nuances, son éclat.
A chaque acte de création et parce que chaque pierre est unique par sa forme, sa structure et sa composition, je m’efforce de mettre l’art au service de la pierre afin de mettre à jour les dessins qu’elle emprisonne tout en respectant ses fragilités. J’œuvre à la sublimer, la rendre plus « légère » tout en veillant à conserver les traits de son caractère.
Malraux dit une chose très simple sur l’art : « C’est la seule chose qui résiste à la mort. » Alors, on pourrait dire que l’art est ce qui « résiste ». Toute œuvre d’art n’est pas un acte de résistance et pourtant, d’une certaine manière, elle l’est.
°° Edith B.K